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des nouvelles de Karine
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des nouvelles de Karine
12 mars 2009

la vengeance

 Il en avait entendu parler. C’était arrivé brutalement. Un soir d’été. C’était sa grand-mère. On lui avait dit qu’elle n’avait pas souffert. Mais il n’en avait rien cru. Il avait été terriblement triste. A en mourir. Il aurait voulu la rejoindre ou se venger. Et il a réfléchi longtemps. Et il s’était dit que le meilleur moyen de trouver la paix, c’était la vengeance. La vengeance pour assécher sa peine. Alors il a mis au point une tactique. Parce qu’il fallait vraiment faire attention. Il ne fallait pas que la moindre erreur lui soit fatale. Il fallait vraiment que tout soit parfait. Alors il s’y est préparé. Il s’est entraîné tous les jours. De la tombée de la nuit à l’aube.

Il se fichait pas mal de la fatigue.

Il se fichait pas mal du regard méprisant des autres.

Il s’était fixé un but, et il comptait bien l’atteindre.

 

Il partait en reconnaissance tous les soirs. Il avait su où ça s’était passé, et il n’avait pas hésité une seconde. Il n’avait pas peur. Il vaincrait. Il l’avait juré sur la tombe de sa grand-mère.

 

Il avait réussi à se faire de plus en plus silencieux. Il approchait son ennemi sans que celui s’en aperçoive. Ça n’est pas venu tout de suite. Il avait frôlé la mort plusieurs fois. Mais il n’avait pas abandonné. Il essayait de contrôler au maximum le battement de ses ailes. C’était devenu son challenge. Il arrivait maintenant à voler en silence. Il s’approchait très près de son ennemi. Il le frôlait et repartait. L’ennemi ne remarquait plus sa présence. Il avait réussi à le défier. Il ne lui restait plus qu’à l’attaquer.

 

Maintenant, il se sentait prêt. Il s’était suffisamment entraîné. Il était enfin temps de passer aux choses sérieuses. Il allait enfin agir. Il était sûr de lui.

 

Ce serait pour la nuit prochaine.

 

Le moment est venu, il s’est élancé. Seul. Avec sa foi. Sa volonté. Son courage. Sans aucun bruit. Il est arrivé. Son ennemi, le bourreau allait devenir sa victime. Celui qui avait écrasé sa grand-mère sur un mur sans pitié aucune, allait souffrir à son tour.

 

Il est arrivé près du corps endormi. Il entendait sa respiration. Une respiration régulière et abandonnée. Une respiration confiante. Une respiration qui ne sent pas le danger. Et pourtant, le danger était là. Bel et bien réel. C’était lui le danger. Lui, cet être si petit. Cet être insignifiant. Cet être qui avait souffert tant de nuits et de nuits pour apprendre à voler en silence. Il avait travaillé sans relâche pour enfin venir à bout de cette tare qui déterminait son espèce et qui causait la mort de nombreux de ses congénères. Le bruit. Le bruit qu’il faisait en volant. C’était sa condamnation à mort. Maintenant, c’en était fini. Maintenant, il volait sans bruit.

 

Maintenant il était là, au-dessus de sa victime. Tout un horizon s’étendait à ses pattes. Il savourait sa vengeance et se demandait par où il allait commencer. Et puis, il s’est dit qu’il fallait se mettre à l’œuvre de suite, s’il voulait avoir fini avant le lever du soleil.

 

Il a commencé par les pieds. Il s’est installé sur le gros orteil droit, et il a sorti sa trompe aspirante.

Et il a commencé à aspirer.

C’était un bonheur incroyable, une délivrance. Puis, il s’est posé sur le doigt de pied d’à côté, et il a aspiré, et il a pensé à sa grand-mère, et a continué à aspirer. Puis il s’est installé entre deux orteils. Il trouvait que c’était un défi de se glisser dans cet étroit passage. Plus rien ne pouvait l’arrêter. Il était gonflé à bloc. Le sang commençait à lui monter à la tête, mais il y était préparé. Il s’était suffisamment entraîné pour ne pas fléchir, à la dernière minute, bêtement.

Et consciencieusement, il a aspiré le sang de chaque orteil, l’un après l’autre. Du pied droit d’abord, du pied gauche ensuite. Sa victime a commencé à bouger. Il s’est éloigné quelques instants. Il ne devait pas se faire prendre maintenant. Il savait que sa mission était kamikaze, et que quoi qu’il arrive, il ne pourrait résister. S’il n’était pas tué avant la fin de sa mission, il ne pourrait survivre à telle ingestion de sang. Mais il l’avait décidé ainsi, alors il n’était pas prêt de s’arrêter.

 

Le calme était revenu, il s’est remis à la tâche. Et il s’est posé sur la jambe droite. Il a continué son travail. Sa vengeance. La jambe droite, puis la jambe gauche. Il prenait soin de n’oublier aucun centimètre de peau. L’image de sa grand-mère constamment dans son esprit le portait. Au fil de la nuit, il sentait ses forces l’abandonner. Malgré l’épuisement, même quand il songeait à abandonner, il revoyait dans son esprit sa grand-mère. Alors il continuait. Encore et toujours.

 

Les premières lueurs du jour commençaient à poindre. Il avait presque fini sa tâche. Le corps entier de sa victime n’était plus qu’une boursouflure. Elle s’était réveillée plusieurs fois. Elle s’était mise à se gratter. Un peu. Puis de plus en plus frénétiquement. Elle n’avait pas cherché le moustique. Elle n’avait pas pu. Elle se grattait. A n’en plus finir. Elle était dans un état incroyable. Elle avait la peau en sang. Elle était agitée. Elle s’était évanouie. Alors il avait pu continuer son travail. Il ne restait plus beaucoup de place sur ce corps méconnaissable. Il restait le visage. Les paupières. C’était son péché mignon. Les paupières. C’était d’une douceur incroyable. Il fallait faire vite. Il sentait ses forces le quitter. Il sentait qu’il mourrait bientôt. Cette tâche qu’il avait accomplie était incroyable pour un être aussi petit que lui. Il avait décidé de mourir sur la paupière. Il a soigneusement aspiré le sang des joues, des lèvres, du front, des oreilles.

 

Il s’est dirigé vers la paupière droite. Il en ferait son lit de mort. Il a sorti sa trompe aspirante. Il a aspiré. Il s’est couché. Il a souri.

 

Dans la chambre, les premiers rayons de soleil ont percé. La porte s’est ouverte. Un long cri a retenti.

 

***

 

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Commentaires
A
toi t'as un problème avec les moustiques... Bisous
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